EXPOSITION
DU 20 SEPT. AU 20 DÉC. 2009

THEREHERETHENTHERE (la Source)

Simon Starling

L’exposition de Simon Starling au Parc Saint Léger s’articule autour de trois nouvelles productions qui sont toutes étroitement liées aux techniques d’impression et au-delà, à la question de l’image et de sa reproductibilité. À travers les liens complexes et féconds que l’artiste met en place entre ces trois œuvres, une relation à des espaces, des temps et des histoires différenciés se tisse et se noue, qui projette le spectateur dans une déambulation mentale où un fossile datant du Jurassique côtoie les techniques d’impression actuelles et où la photographie du XIXème siècle trouve sa matérialisation dans un volume composite.

La première installation que l’on découvre dans l’espace La Source (demi-teinte), 2009, est une coproduction entre le Parc Saint Léger et le CIAV, Centre International d’Art Verrier de Meisenthal en Alsace. Le point de départ de l’œuvre est une photo trouvée représentant l’intérieur de la salle d’exposition du centre d’art et datant du XIXème siècle. À cette époque, le centre d’art est encore une usine d’embouteillage d’eau de source qui est produite sur le site même. La photographie montre des centaines de bouteilles au sol, dans un alignement parfait, en attente d’être remplies. On y discerne également des ouvriers, tirant des chariots de bouteilles vides ou simplement assis au sol et vissant des bouchons. Cette photographie, agrandie, tramée et imprimée en sérigraphie, est visible depuis l’extérieur du centre d’art, un fragment de l’image a été découpé formant un rond circulaire qui révèle à la fois le mur et l’architecture du bâtiment. En pénétrant dans l’espace, le visiteur emprunte un passage de bois circulaire, semblable à ceux que l’on peut trouver sur les chantiers. Dans l’espace central, des milliers de boules de verres noires de diamètre différents sont posées directement au sol, formant une constellation mystérieuse et apparemment sans ordonnancement spécifique. Les boules noires, d’un noir profond et néanmoins brillant, réfléchissent l’architecture du lieu mis à nu, créant une multitude d’images distordues de l’espace environnant. Si le chaos apparent des boules contraste vivement avec l’ordre rigide des bouteilles de la photographie, il est néanmoins aisé de reconnaître dans ce lieu la réplique un siècle plus tard de la photographie à l’extérieur du bâtiment. En continuant le passage en bois, le visiteur monte sur une mezzanine, où, dans un mouvement de l’abstraction vers la figuration, il découvre que les boules noires forment le fragment d’image manquant à la photographie de l’entrée.

La deuxième œuvre présente dans l’exposition est une série de 6 lithographies intitulée Archaeopteryx Lithographica. Cette série tire son nom d’une des plus importantes découverte de fossile (en l’occurrence le fossile d’une plume) qui marquera un tournant de l’histoire des sciences au XIXème siècle. Et par un des effets de mise en abîme dont Starling a le secret, cette œuvre nous raconte comment l’évolution des techniques d’impression et l’invention de la lithographie impacta de manière directe notre compréhension de la nature, en validant notamment la théorie de l’évolution de Darwin. Petit rappel des faits : la lithographie a été inventée en 1796 par Aloys Senefelder, un dramaturge autrichien vivant en Allemagne, qui expérimenta une nouvelle technique de gravure en utilisant une encre grasse sur un bloc de calcaire du petit village allemand de Solnhofen. Le fossile de plume quant à lui fut découvert en 1861 par Hermann Von Meyer, également enchâssé dans un bloc de calcaire de Solnhofen, et provient d’un « Unvogel », un oiseau primitif, lointain cousin des dinosaures. Cet oiseau fut nommé par la suite « Archaeopteryx Lithographica » en référence au bloc de calcaire issu du Jurassique, le même que celui qui fut extrait à Solnhofen pour produire les premières plaques de lithographie, faisant de ce fossile la première lithographie jamais réalisée, 150 millions d’années avant la découverte de Senefelder. Lorsque Von Meyer publia ses découvertes en 1861, le texte fut illustré par une lithographie du fossile. La série des lithographies présentées pour l’exposition révèle plusieurs étapes de ce double processus de découverte, celui de la lithographie et celui du fossile, dans un mouvement de poupée gigogne présentant au final l’image de l’image de l’image.

La dernière installation de l’exposition s’intitule Maquettes en blanc (Monographies 1995-2009). Ces maquettes en blanc, bien connues des spécialistes du monde de l’édition, sont des maquettes vierges que le graphiste transmet à l’imprimeur en amont de l’impression et qui restitue un squelette muet de l’objet à venir. Les publications ont toujours été centrales dans la pratique de Simon Starling, plus qu’une excroissance du travail, elles en font partie intégrante. Son travail s’articulant autour de la question de la performance, du processus et de la documentation, les catalogues de Starling doivent alors être perçus comme ayant le même statut et la même importance que ses installations, photos, sculptures ou films. Le plus souvent, ces publications offrent un éclairage et une documentation sur le processus à l’œuvre, les recherches entreprises et le réseau complexe de connexions et de sources diverses qui précèdent l’existence de l’œuvre. Dans certains cas, (24hr Tangenziale, 2006/ Three Birds, Seven Stories, Interpolations and Bifurcations, 2008), l’exposition devient même le lieu du processus de fabrication de l’objet éditorial.

Maquettes en blanc (Monographies 1995-2009) est un projet évolutif qui sera présenté pour la première fois et en simultané au MAC/VAL et au Parc Saint Léger. Pendant toute la durée de l’exposition, plus d’une vingtaine de publications seront présentées telles des sculptures dans l’espace même d’exposition. Chaque publication sera présentée à la fois dans sa version finale et dans sa version maquette.

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