EXPOSITION
DU 22 MAI AU 30 JUIN 2007

Enclave

Sébastien Hoëltzener

Galerie Goya, Collège René Cassin, Cosne-Cours-sur-Loire

Enclave : situation d’un terrain complètement entouré par des terres appartenant à d’autres propriétaires et n’ayant pas d’accès à la voie publique ; territoires, pays placé à l’intérieur d’un autre territoire ou pays ; îlot contrastant par son atmosphère, son organisation avec ce qui l’entoure. Encastrement où vient se loger un objet. Fait de s’étendre, de mordre, de déborder sur.

Les définitions strictes du dictionnaire de la langue française abordent ce vocable comme un empiètement sur un territoire donné. La situation même de l’installation de Sébastien Hoëltzener, invité dans la galerie du collège de Cosne a ceci de paradoxal qu’elle s’inscrit pleinement en ces lieux tout en impliquant très directement le spectateur dans sa (non) découverte. Liberté est laissée à chacun de découvrir par un œilleton percé à cette occasion dans la porte d’entrée de la galerie, une « décomposition » ou « déposition » des éléments architecturaux constitutifs du lieu : la porte, la baie vitrée donnant sur l’extérieur, la surface au sol de la salle. La possibilité est également offerte au public de sortir du collège et « de voir » au travers de la baie vitrée tout en traversant cet entre-deux d’un terrain hésitant entre les abords en friche à l’arrière de l’établissement et une zone pavillonnaire. Espace également colonisé par une plantation céréalière, clin d’œil au travail de jardin que l’artiste développe depuis plusieurs années. Déjà invité en résidence au Parc Saint Léger en 2005[1], Sébastien Hoëltzener travaillait patiemment à la constitution d’un ordonnancement de carrés de pommes de terre plâtrées, encloses dans leurs enveloppes blanches à l’image d’un soin porté à une énergie qui sourd encore… La radicalité de la proposition qui intégrait de manière très subtile la lumière naturelle des ouvertures de l’espace central du Centre d’art, prenant la forme de découpes carrées projetées au sol, n’est pas sans rappeler la proposition de l’artiste dans la salle du collège. La sobriété des matériaux utilisés, la modification perceptive de l’espace, l’agencement précis des matières entre elles.

L’invitation de Sébastien Hoëltzener à Cosne renouvelle ainsi la possibilité donnée à des artistes de produire des œuvres pour l’espace de la galerie. Après Anne de Villèle, qui en 2004 réalisait une pièce spécifiquement pour la galerie, Sébastien Hoëltzener engage son travail artistique dans ce lieu conjointement à des interventions régulières avec les élèves dans le cadre d’un atelier de pratique artistique.

Le travail de Sébastien Hoëltzener se dévoile avec pudeur. Rien de grandiloquent mais un geste très juste et sensible en regard de l’espace qui lui est proposé, le révélant sans le brutaliser mais en y apportant toutes les nuances d’une réflexion basée à la fois sur l’ambivalence d’un espace domestiqué et naturel, et sur l’importance du regard posé sur ce qui nous entoure. Ce regard de l’artiste et de celui qui lui fait face inscrit dans une vaste histoire de l’art qui depuis la camera obscura en passant par les expériences de la perspective à la Renaissance, n’ont cessé de réinterroger l’espace et la place du regardeur.

 

Valérie Pugin, chargée du programme Hors les Murs
Parc Saint Léger – Centre d’art contemporain

[1] « À partir de trois c’est la foule », résidence collective de Xavier Drong, Sébastien Hoëltzener et Nicolas Royer.