EXPOSITION
DU 8 nov. 2019
au 21 fév. 2020

L’iris si dilaté
nous enfonçait
dans un trou noir

Camille Tsvetoukhine

Lycée Raoul Follereau, Espace Claude Parent, Nevers

Tout projet de Camille Tsvetoukhine débute par l’écriture d’un texte. Qu’il soit narratif ou poétique, le texte inspire la forme des œuvres.  Son univers est largement nourri de littératures critiques, fantastiques ou mythologiques, de cinéma ou encore d’anecdotes personnelles. L’iris si dilaté nous enfonçait dans un trou noir, titre de cette nouvelle installation, est aussi le début du texte à l’origine de l’exposition. D’emblée, celui-ci nous plonge dans un milieu où foisonnent les métaphores et les doubles sens. Il questionne de façon poétique notre rapport à la nature et le regard porté sur notre environnement. Le texte évoque aussi des rites aux accents combatifs menés par des figures féminines, peut-être des sorcières qui, selon les époques ou les milieux, sont perçues comme maléfiques ou au contraire bienfaitrices. Au croisement entre le réel et l’imaginaire, l’artiste nous invite à expérimenter une forme d’ambivalence sensible.

Attachée à la fabrication de ses objets, Camille Tsvetoukhine cultive une esthétique artisanale teintée de culture pop et un certain sens du décoratif. Plusieurs formes reviennent de manière récurrente telles que les vêtements, les textes sur du textile ou encore les objets en céramique. Si ses sculptures, peintures et banderoles portent la trace d’un récit, elles n’en sont pas une simple illustration. La narration proposée pour cette exposition combine des éléments spécifiquement conçus pour le lieu avec des œuvres plus anciennes, et propose ainsi des réagencements quasi infinis des objets et des récits. Ainsi, les deux capes qui traversent l’espace affirment leur nature ornementale par le choix des couleurs et des textures. Le vêtement devient aussi un support de peintures dont l’iconographie évoque un monde mythique et animiste. D’autres éléments tels que des pieds en céramique, à la fois contenus et contenants, témoignent d’un rapport soutenu à la terre, tout comme les nombreuses fleurs peintes. On retrouve également des motifs plus aériens, telle cette grande banderole qui déroule une série de prénoms, essentiellement féminins, et qui représente la liste d’ouragans destructeurs. À cela s’ajoute l’image d’une lune en céramique qui semble à la fois observer et parfaire cette cosmogonie.

Avec cette installation, Camille Tsvetoukhine questionne non seulement la relation à notre environnement mais plus encore la nature de notre regard. À l’aide de références féminines, et plus explicitement en convoquant l’effigie de la sorcière, elle nous propose un récit qui remet en cause le dualisme entre culture et nature, et qui interroge les rapports de pouvoir et de transmission du savoir. La sorcière, en tant que figure satanique, apparaît au début de l’ère moderne, période où s’impose la société capitaliste, rationnelle et patriarcale. Aujourd’hui, elle revient en tant que représentation d’une féminité émancipée et en tant que possible alternative dans nos rapports aux savoirs et à notre entourage. Dans la lignée des mouvements éco-féministes, la sorcière n’est plus réduite à un épisode folklorique ou anecdotique. Au contraire, elle permet de véhiculer un nouveau récit favorisant un savoir sensible où les idées ne sont pas dissociées de leurs milieux. Elle se présente comme une figure nécessaire pour créer de nouvelles images, de nouveaux paysages et une nouvelle pensée.

Catherine Pavlovic

INFOS PRATIQUES

VERNISSAGE

jeudi 7 novembre à 18h

LECTURE PERFORMÉE

mardi 11 février à 14h

Visites sur rendez-vous auprès de Olivier Dumont :
tél. 03 86 60 36 00

Lycée Raoul Follereau, Espace Claude Parent
9 Bd Saint-Exupéry – 58000 Nevers